Sang Tabou…

Abidjan, 19 Octobre 2023-La Ligue/- Chaque 28 mai 2023 est déclarée Journée mondiale de l’hygiène menstruelle pour mon plus grand bonheur.

L’équipe de La Ligue lors de la collectes de serviettes à Cap Sud

Autrefois, dire que j’avais mes règles n’était pas considéré comme normal, et j’ai toujours cherché à esquiver la question, même dans l’intimité. 

Avoir mes  » 99+1 « ,  ”les anglais ont débarqué ” , sont des expressions que moi, beaucoup d’autres filles et femmes préfèrent employer pour désigner les règles. 

Mais la stigmatisation qui frappe les menstruations va bien au-delà de l’utilisation d’euphémismes. Ce phénomène naturel qui consiste, pour nous les femmes, à perdre un peu de sang tous les mois, reste un tabou dans toutes les sociétés.

Certaines filles ou femmes en ont honte mais ma préoccupation à propos des règles se porte sur celles qui n’ont pas les moyens d’acheter des serviettes et sont obligées d’utiliser des morceaux de tissus. 

Nous savons que dans toutes les sociétés, les périodes menstruelles demeurent un sujet tabou, largement évité dans les débats. Pourtant, il est prouvé que des millions de personnes dans le monde ne peuvent vivre ce cycle naturel dignement, faute de moyens.

La précarité menstruelle touche environ 500 millions de personnes dans le monde (Geng, 2021). Et selon UNICEF (2018),  à l’échelle mondiale, 2,3 milliards de personnes manquent encore d’accès aux services sanitaires basiques et, dans les pays moins développés, seulement 27 % de la population possède un dispositif de lavage des mains avec de l’eau et du savon. Ceci engendre donc des inconvénients et des difficultés énormes pour les femmes et les adolescentes concernant la gestion de leurs menstruations.

Le continent africain est fortement touché aussi par cette précarité menstruelle. En effet, lorsque l’on considère que 40 % des foyers du continent vivent sous le seuil de la pauvreté, on peut en déduire que peu de familles peuvent se fournir en protections adéquates.

En Côte d’Ivoire, la précarité menstruelle en milieu scolaire est très fréquente. De nombreuses filles n’ont pas accès à des serviettes hygiéniques faute d’informations ou de moyens pour en acheter. Cela entraîne souvent notamment de l’absentéisme à l’école.

Outre le l’aspect économique, le tabou demeure l’une des causes principales de la précarité menstruelle. Le tabou concernant les menstruations est enraciné dans l’inégalité de genre, les traditions culturelles et religieuses concernant les règles sont souvent issues de normes patriarcales discriminatoires portant sur  le statut inférieur et le rôle des filles dans la société .

De ce fait, ces normes discriminatoires et les attitudes négatives à l’égard des règles affectent l’estime de soi des filles et les renferment sur elles-mêmes, développant souvent en elles la honte de parler de leurs difficultés à leur entourage.

Chaque fois que je repense à cette date qui marque la plaidoirie contre la précarité menstruelle qui est le non accès aux protections hygiéniques, je pense à ces petites filles et femmes qui ont été contraintes de fuir leurs maisons à cause de la guerre des gangs en Haïti , qui vivent pratiquement déjà dans la rue et dans la misère et il est clair que le coût moyen d’un paquet de serviettes hygiéniques n’est pas accessible à tous. 

C’est un problème majeur quand on sait que certaines femmes et filles se mettent à utiliser des tissus qui ne sont pas susceptibles d’absorber le flux sanguin. Et elles sont souvent exposées à des infections graves qui affectent leur vie. 

Alors que cette journée génère beaucoup de débat dans le monde, des associations féministes comme « La Ligue Ivoirienne des droits de femmes » se mobilisent pour mener des actions concrètes.  

Pour faire face à ces difficultés, un seul objectif est de mise : mettre fin à la précarité menstruelle. Pour cela, la Ligue accompagne ces jeunes femmes et filles qui sont dans l’incapacité de s’acheter des serviettes de protection. 

Des actions sont mises en place pour aider ces filles et ces jeunes femmes à comprendre leurs corps et vivre une vie normale, digne et émancipée, notamment à travers des kits de produits hygiéniques.

Mais la plus grande bataille reste à gagner, celle pour qu’un jour, l’accès à des serviettes de protection de qualité soit aussi banal que l’accès aux préservatifs.

Jenny Priston, Haïti

La Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes
est une organisation féministe créée par des jeunes femmes ivoiriennes engagées dans la promotion des droits des femmes ainsi que la lutte contre les violences faites les femmes.

Suivez nous

×

 

Hello!

Cliquez ici pour dénoncer un cas de violence ou pour parler à quelqu'un

× Dénoncer