Le harcèlement scolaire : un fléau à combattre

Abidjan, 7 Novembre 2024-La Ligue /De nos jours, le harcèlement scolaire fait de plus en plus de victimes et impacte profondément la vie des enfants et des adolescents. Selon une enquête de l’OMS, en moyenne, 6 % des adolescents se livrent à des actes de harcèlement à l’école et 11 % des adolescents ont été victimes de harcèlement scolaire.

Les filles en sont d’autant plus affectées : 1 adolescent sur 10 en est parfois venu aux mains à l’école, avec 14 % des garçons contre 6 % des filles.

Les États membres de l’UNESCO ont déclaré le premier jeudi du mois de novembre Journée Internationale contre la violence et le le harcèlement à l’école. L’objectif est de sensibiliser les acteurs du parcours éducatif de l’enfant à participer à la prévention de toutes les formes de violence, et de privilégier des environnements d’apprentissages sûrs, indispensables à la santé, au bien-être et à l’apprentissage des enfants et des jeunes.

La Ligue vous dresse le portrait de deux jeunes femmes, victimes de harcèlement scolaire et dont la vie a complètement basculé.

« Face au harcèlement, la voix d’une survivante engagée »

Rose Prisca est bénévole à la Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes. 

À l’âge de 7 ans, elle quitte son village pour Abidjan afin de poursuivre ses études. Mais pendant sept longues années, de ses 7 à ses 14 ans, Rose est harcelée par des camarades de classe. Les enseignants tentaient d’intervenir quand ils en étaient témoins, mais leurs réprimandes n’ont jamais suffi à stopper cette vague de violences. 

Au primaire, pour se défendre, elle a dû affronter physiquement l’élève le plus redouté de sa classe. Cette victoire lui offre un répit temporaire, mais au collège, le harcèlement reprend de plus belle. Cette fois, un éducateur est contraint de menacer les agresseurs de conseils de discipline pour leur faire cesser leur comportement.

Pour Rose, il y a eu un « avant » et un « après » harcèlement. La jeune fille autrefois curieuse, joviale et pleine de vie lutte désormais contre un profond manque de confiance en elle, peinant à retrouver une véritable estime de soi. Aujourd’hui, elle se met souvent des barrières lorsqu’elle rencontre un groupe, attendant des signes d’intérêt avant de se rapprocher, par peur d’être rejetée.

Rose Prisca, à la rentrée de la 3e promotion des bénévoles de La Ligue

Rose partage avec nous des solutions concrètes pour lutter contre le harcèlement scolaire. Elle recommande aux parents de surveiller la vie de leurs enfants à l’école en échangeant régulièrement avec eux, en rencontrant leurs camarades et en s’intéressant à leur environnement quotidien. Elle conseille aussi aux encadrants de bannir tout favoritisme, de porter attention à chaque élève et de protéger les plus vulnérables.

Aujourd’hui, Rose se reconstruit à travers le féminisme et s’engage au sein de la Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes pour lutter contre les violences basées sur le genre.

Quand l’innocence est brisée : un appel à agir contre le harcèlement scolaire

Chaque jour, à 10 heures et à midi, la mère de Salimata appelait l’enseignante de sa fille pour prendre des nouvelles et s’assurer de son bien-être. Petit à petit, un lien amical s’était tissé entre elles, un réconfort dans l’angoisse et l’impuissance qui l’habitaient depuis les récents incidents. Elle oscillait entre une profonde inquiétude pour l’avenir de sa fille et une colère sourde face à la situation.

Jusqu’à ses 5 ans, Salimata était une enfant joyeuse et pétillante. Cependant, à cet âge, elle a vécu deux mois de harcèlement à l’école, perpétré par des élèves d’à peine un an de plus qu’elle, âgés de 6 à 7 ans. Alors qu’elle était en classe de cours préparatoire (CP), ces élèves de cours élémentaire première année la prenaient pour cible. Salimata subissait des insultes racistes (« sale noire »), des rumeurs malveillantes auprès des enseignants, ainsi que des blocages physiques et des violences, aussi bien physiques que morales. Terrifiée, elle pleurait chaque matin avant d’aller à l’école et s’était renfermée sur elle-même, effrayée par cette hostilité quotidienne.

Un jour, sa mère, désemparée, a pris les choses en main en se rendant directement à l’école. Salimata, courageuse, a désigné ses harceleurs, et l’institutrice, avec le soutien du personnel encadrant, a agi immédiatement. La peur des représailles a dissuadé les agresseurs, et le harcèlement a cessé.

Aujourd’hui, de retour en Côte d’Ivoire, Salimata reste encore quelque peu réservée, et sa mère porte toujours les stigmates de cette période douloureuse. Elle se souvient des jours où elle a pleuré sans fin, bouleversée d’apprendre que sa fille se cachait dans les buissons durant les récréations, pour échapper aux jets de pierres. La souffrance de sa fille résonnait en elle. Désormais, elle encourage les parents à dialoguer avec leurs enfants et à être vigilants, afin de prévenir et éradiquer le harcèlement scolaire. Dans le cas de Salimata, il s’agissait d’enfants de 6 à 7 ans ; elle redoute l’idée de ce que pourraient faire ces mêmes enfants une fois au collège, si la victime reste silencieuse ou si les parents n’accordent pas d’attention aux changements de comportement de leur enfant.

À l’image de Salimata et de nombreux autres enfants, des élèves subissent le harcèlement scolaire, une réalité de plus en plus amplifiée par les réseaux sociaux. Il est urgent de sensibiliser parents et éducateurs pour endiguer cette violence insidieuse et protéger la jeunesse.

Note : le prénom « Salimata » a été utilisé pour protéger l’identité de la mineure.

Comment lutter contre le harcèlement scolaire ?

La lutte contre le harcèlement scolaire nécessite une action de tous les acteurs : 

  • Les élèves : en dénonçant les faits, en soutenant les victimes, en refusant d’être spectateurs.
  • Les enseignants : en étant attentifs aux signes de mal-être, en intervenant rapidement, en favorisant un climat scolaire positif.
  • Les parents : en étant à l’écoute de leurs enfants, en collaborant avec l’école, en informant les autorités compétentes si nécessaire.
  • Les institutions scolaires : en mettant en place des programmes de prévention, en formant les personnels, en sanctionnant les auteurs de harcèlement.

Les clés d’une prévention efficace

Plusieurs leviers d’actions peuvent être utilisés dans le but de prévenir le harcèlement en milieu scolaire.

  • Sensibiliser tous les acteurs de la communauté scolaire : élèves, enseignants, parents, personnels administratifs.
  • Éduquer les adultes sur le phénomène pour qu’ils puissent identifier les situations de harcèlement et y apporter une réponse adaptée.
  • Créer un climat scolaire positif  basé sur le respect, la tolérance et l’écoute.
  • Mettre en place des canaux de signalement pour que les victimes puissent se confier en toute sécurité.
  • Favoriser le dialogue entre les élèves, entre les élèves et les adultes.

Le harcèlement  dans le milieu scolaire est un problème de société qui nécessite une mobilisation de tous. En agissant ensemble, nous pouvons créer des environnements scolaires plus sûrs et plus inclusifs pour les élèves. 

Écrit par Marianne Thiémélé et Giscard Kababa

La Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes
est une organisation féministe créée par des jeunes femmes ivoiriennes engagées dans la promotion des droits des femmes ainsi que la lutte contre les violences faites les femmes.

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