La voix d’une jeune activiste : Entretien avec Janice Sosoo, 16 ans, engagée pour les droits des filles

À l’occasion de la Journée Internationale des Filles, la défense et la promotion des droits des filles demeurent au cœur des valeurs de La Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes.

Nos actions visent à aller à la rencontre des jeunes filles, leur offrir un espace de dialogue et leur partager des conseils essentiels pour leur développement personnel. Lors de ces échanges, nous abordons des sujets cruciaux tels que les violences physiques et sexuelles, en insistant sur la notion fondamentale de consentement.

Nous saisissons également l’occasion pour parler de droits sexuels et reproductifs, d’hygiène menstruelle et de la précarité qui peut y être associée, tout en procédant à une distribution gratuite de protections hygiéniques, afin de soutenir les jeunes filles dans leur quotidien. Ces discussions sont un moyen d’encourager leur bien-être, leur épanouissement, et de leur donner les outils pour mieux comprendre et défendre leurs droits.

En plus de nos actions permanentes, cette année, pour la Journée internationale des Droits des Filles, nous rencontrons Janice Sosoo, 16 ans, présidente de la pépinière de la Ligue Ivoirienne des droits des Femmes, pour discuter de la journée de la fille et de son dévouement à faire respecter les droits des filles. 

Janice Sosoo, 16 ans.

Mes luttes, je les tiens des souvenirs de mon arrière-grand-mère Atchrè qui a toujours travaillé à l’épanouissement des autres.

Aujourd’hui, j’ai 16 ans, je suis en  terminale et je continue ma lutte. Je rêve d’être une journaliste afin de mieux faire entendre la voix des enfants et des jeunes filles”. 

La Ligue : Qui est Janice Sosoo ? 

JS :  Je m’appelle Janice Sosoo, on me surnomme aussi Atchrè qui signifie ‘’ celle qui oriente ‘’. Dès l’âge de 8 ans,  je commence à mobiliser des enfants de 6 à 10 ans pour créer mon groupe “les donneurs d’espoir”. Ce groupe va chanter et initier des spectacles de bienfaisance afin de passer des messages de soutien aux enfants cancéreux, faire des dons de médicaments aux enfants souffrant de paludisme et faire des dons en vivres et non vivres aux orphelins et aux enfants prisonniers.

À 12 ans, vu l’actualité des violences sexuelles faites aux enfants,  j’ajoute à mon arc la lutte contre les violences faites aux enfants et aux jeunes filles. C’est dans ce contexte que je me suis engagée à faire participer les filles de ma génération à des formations et activités sur le consentement, le leadership, la précarité menstruelle, les grossesses précoces…etc. organisées et animées non seulement par la Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes mais aussi par d’autres associations.

Janice Sosoo ( à gauche ) avec Désirée Deneo (Secrétaire Générale de la Ligue) lors d’une formation sur le consentement avec La Ligue à Unicef.

La Ligue : Pour toi, que représente la journée de la fille ?

JS : La journée de la fille est une journée symbolique qui nous met en mission pour mobiliser et informer les filles sur leur condition. C’est une date où les filles doivent garder en mémoire qu’elles sont des étoiles, qui doivent briller le monde de par leur intelligence, leur créativité, leur force.

La Ligue : Quels sont les droits dont tu penses que les filles devraient bénéficier ?

JS : Les filles doivent avoir les mêmes droits que les garçons. Les filles ont droit à l’éducation, à la protection, à la santé, à l’information, à la liberté d’expression, à l’identité…

Janice a marrainé 50 repas pour des enfants orphelins et bénévoles.

La Ligue : Comment qualifierais-tu la situation actuelle des filles de ton village / entourage ? Penses-tu qu’elles jouissent totalement de leurs droits ou est-ce qu’il y a encore du chemin à parcourir pour que leurs droits soient respectés ?

JS :  Dans mon entourage, il y a beaucoup d’amélioration grâce à nos actions. Depuis 6 ans, nous travaillons à autonomiser les filles par des formations, des sensibilisations. Aujourd’hui, elles s’affirment mieux, elles ont beaucoup confiance en elles. Nous leur donnons un espace sécurisé où elles peuvent parler sans crainte, beaucoup de filles harcelées ont été entendues. Mais il reste encore du travail à faire.

La Ligue : As-tu déjà été témoin de violences faites sur une amie ou une inconnue de ton âge ? Si oui, peux-tu nous citer les différentes formes de violences dont cette fille a été victime?

JS : Malheureusement oui ! Des amies et même des petites filles du quartier sont victimes de violences. Je cite : 

– Violence domestique avec une dame qui passe son temps à battre sa fille de maison, la fille en question  doit avoir juste 14 ans, elle était fatiguée d’être violentée alors la petite a pris la fuite ;

– Harcèlement de certains enseignants sur des élèves. Dieu merci nous avons sensibilisé les filles à dénoncer, heureusement les harceleurs ont été démis de leur fonction ;

– Violence sexuelle (Attouchements intimes dans les quartiers précaires où il a des cours communes ou encore pendant les études avec des ainées…) et le viol d’une petite fille autiste âgée de 9 ans. Ce dernier cas de violence m’a particulièrement touchée et m’a brisée parce qu’il n’y a pas eu de suite.

– Et beaucoup, beaucoup de violences psychologiques….

La Ligue : Qu’aimerais tu changer dans ta communauté pour améliorer la vie des filles ?

JS : Je voudrais apporter plus de protection aux filles. Créer des conditions pour qu’elles s’expriment, organiser des forums, assez de panels, des conférences…

Janice Sosoo lors d’un panel à l’occasion de la Journée Mondiale de l’Enfance.

La Ligue : Selon toi, quelle serait la première étape pour permettre l’autonomisation des filles ?

JS : La première étape c’est d’ouvrir des espaces de rencontre pour les filles et d’avoir de grands acteurs de développement pour pouvoir contribuer à l’autonomisation  des filles. C’est la bonne occasion que nous avons eu avec la Présidente de la ligue ivoirienne des Droits de la femme et bien d’autres personnes impactantes.

Janice Sosoo ( à droite) avec Meganne Boho ( Présidente de la Ligue Ivoirienne des droits des Femmes) recevant un kit de serviettes hygiéniques pour son association “les donneurs d’espoir”. 

La Ligue : Penses-tu que les filles doivent être encouragées à poursuivre leurs rêves et ambitions ? Si oui, pourquoi ?

JS : Oui, elles doivent être encouragées à poursuivre leurs rêves et leurs ambitions parce que les filles peuvent et doivent changer le monde.

La Ligue : Quels sont les obstacles que tu as déjà dû surmonter en tant que fille ? 

JS : Les obstacles que j’ai déjà rencontrés sont :

– La réaction de certaines filles qui pensent qu’on en fait un peu trop ;

– Le manque de moyens financiers et de matériels pour mieux agir. 

La Ligue : Comment peux-tu aider à faire entendre la voix des filles qui n’ont pas accès à leurs droits ? 

JS : L’aide que je peux apporter est d’animer des émissions pour parler des droits des filles et aussi mener des campagnes de sensibilisation en posant des actions concrètes dans les villages.

La Ligue : Quel message aimerais-tu transmettre aux filles du monde entier pour cette journée spéciale ? 

JS : Mon message adressé aux filles du monde entier est  : ‘’ Croyez en vous, inscrivez vos objectifs sur votre vision board et rêvez grand. Dites-vous chaque jour que vous avez pour mission d’être des actrices de changement et de développement. Le monde ira mieux grâce à vous‘’ !


Janice Sosoo

Interview réalisée par Jenny Prinston

La Ligue Ivoirienne des Droits des Femmes
est une organisation féministe créée par des jeunes femmes ivoiriennes engagées dans la promotion des droits des femmes ainsi que la lutte contre les violences faites les femmes.

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